
À la suite de notre article sur les vitraux inférieurs de l’abside, où nous évoquions Lady Ashburton qui dota généreusement l’église pour la mise en place de trois des cinq verrières, nous avons reçu de Monsieur Jean-Claude Marc, président de l’Association de Généalogie de Taverny, ce récit touchant de la vie d’une autre donatrice de Taverny.
Avec son accord, c’est avec grand plaisir que nous le publions.
« Ma trois fois arrière-grand-mère, Marie-Christine Jubert, n’a pas eu une vie très rose. Née en 1818 à Taverny, mariée à 19 ans et veuve à 26, elle a eu deux enfants Cyprien Gabriel (1838) et Louis Alexandre Clervoy (1840).
Tous deux décèdent la même année : 1875. En mémoire de ses enfants disparus, elle offre un vitrail à l’église lors des embellissements effectués à la fin des années 1870.

Le vitrail se trouve au centre de la chapelle à gauche de l’autel. Il y est mentionné en latin, en bas, la donatrice et ses enfants. J’ai trouvé cette information en indexant les archives paroissiales, un peu par hasard. Le nom de Clervoy (ma grand-mère paternelle) a accroché mon regard.
Louis Alexandre Clervoy tenait la charcuterie qui se trouvait rue de Paris entre la boulangerie Degrolard et Carrefour city, à la place de l’actuel salon de toilettage de chiens. »

Le vitrail offert par Marie-Christine est celui de la représentation des «mystères glorieux» du chapelet : la Pentecôte, l’Assomption de la Vierge Marie, le Couronnement de la Vierge Marie « Reine du ciel ». (1)
Le vitrail se trouve dans l’asbidiole nord (ancienne chapelle de la Vierge devenu aujourd’hui l’emplacement du tabernacle).
Il a été réalisé en 1877 par l’atelier Gsell-Laurent, sous l’impulsion du curé de l’époque, l’abbé Octave Poulain, dans la continuité des travaux entrepris par son prédécesseur pour fermer les verrières du choeur.
Le compte-rendu du Conseil de fabrique évoque en ces termes le don de cette paroissienne.
« La personne qui a donné le vitrail du milieu de (…) voulu le payer tout entier ; c’est dans ce but qu’elle a remis à (…) francs. Monsieur le Curé croit pouvoir la nommer maintenant, puisque (…) sur le verre la désigne clairement : c’est Madame Veuve Marie-Christine (…) cette verrière en mémoire de ses deux fils Cyprien et Alexandre.
In memoriam Cypriani et Alexandri
Filiorum Mater
Maria Christina Clervoy dedit (2)
MM . les Conseillers louent la modestie de cette pieuse dame, l’amour de cette (…) la générosité de ce grand cœur… »

Sans doute Marie-Christine venait-elle souvent se recueillir au pied de la statue de la Vierge, devant ce vitrail à la mémoire de ses enfants…

(Merci à Monsieur Jean-Claude Marc pour ce témoignage et les documents qu’il nous a autorisés à mettre en ligne)
Thérèse Leroy
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(1) Dans sa monographie, Ernest Gaillard fait une petite erreur : il indique que cette dédicace se trouve sous le vitrail des mystères douloureux (commémorant notamment la mort de Jésus) et attribue ce choix à la douleur d’une maman ayant perdu ses enfants. Peut-être était-ce en effet le souhait initial de Marie-Christine (d’autant que le Conseil de Fabrique mentionne « le vitrail du milieu » qui est celui des mystères douloureux), mais l’inscription est bien sous le vitrail des mystères glorieux.
(2) « Marie-Christine Clervoy a fait ce don en mémoire de ses fils Cyprien et Alexandre. »
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Sources bibliographiques : Monographie (inachevée) de l’église de Taverny, parue dans les bulletins paroissiaux de 1906 à 1909, par Ernest Gaillard / Archives paroissiales du Conseil de Fabrique numérisées par l’AGT
Photos : Photo du vitrail : ACNDT / Photo de Marie-Christine Jubert : archives personnelles de Mr Jean-Claude Marc / Photo de la dédicace : AGT
Une réflexion sur “– 1877, une donatrice discrète –”